Ă l'heure oĂč j'Ă©cris ces lignes, je viens dâattraper le covid. On est lundi, je suis en plein lancement de ma boĂźte, et câest toute ma semaine qui sâannule.
Comme tous les freelances, je suis la seule capitaine de mon navire. Difficile donc de me reposer sur un moussaillon en attendant de remonter la pente. C'est un temps perdu qui pourrait gĂ©nĂ©rer beaucoup dâinquiĂ©tudes.
đ» Je suis temporairement K.O., kaput, bonne Ă nada, et je gĂšre. Et pourtant, je vis ça avec tranquillitĂ©. Voici pourquoi...
En premier lieu, il faut bien sûr prévenir toutes les personnes que tu devais voir que tu es malade.
On nâĂ©crit pas des mails Ă rallonge pour se justifier. On est malade, on sera sur pied probablement la semaine prochaine. Ăventuellement, tu peux rassurer le client en disant que tu discuteras du planning dĂšs ton retour.
Ce nâest pas le moment de gĂ©rer plus dâorganisation. Tu pourras t'en occuper dans une semaine, une fois que tu seras sĂ»r.e dâĂȘtre en forme et disponible.
Ainsi, on ne propose pas non plus de « faire peut-ĂȘtre le rendez-vous demain si ça va mieux ».
Quand on est malade, câest comme quand on gĂšre un projet : on ne fait pas dâambigĂŒitĂ© (mĂȘme si câest tentant). Typiquement si on a le covid, le plus malin est de partir du principe quâon en a pour cinq jours, et de bloquer ces cinq jours dĂšs maintenant.
Pourquoi câest important ?
Pour toi, ça te permet de te reposer sans avoir Ă tenir tout le monde au courant, ni avoir Ă dire deux fois aux mĂȘmes personnes que tu annules un rendez-vous.
Pour les autres, ça permet de sâorganiser avec une relative fiabilitĂ© en consĂ©quence.
On se figure souvent quâon va « rattraper » tout ce quâon a loupĂ© dĂšs quâon ira mieux. Mais deux obstacles se prĂ©sentent :
1. En général, on veut récupérer son retard au plus vite, mais on a déjà des choses prévues la semaine suivante. Difficile de chevaucher les tùches.
2. En sortant de maladie on est encore fatigué. Est-ce réellement le moment de « mettre les bouchées doubles » ?
Il faut donc faire la paix avec le principe de rattrapage, car tu ne pourras pas « tout » rattraper, ni « vite » le faire.
Câest le moment de trier les must-have des nice-to-have de ta semaine. Vois cela comme un exercice de productivitĂ©.
Il y a sĂ»rement quelques tĂąches quâil nâest pas grave dâabandonner ou que tu peux dĂ©cemment remettre Ă bien plus tard.
Par exemple :
- Il est prioritaire de rappeler un prospect.
- Il nâest pas prioritaire de prendre ce cafĂ© avec cet ancien collĂšgue qui pourrait hypothĂ©tiquement vous apporter du rĂ©seau.
On ne cherche pas Ă tout rĂ©cupĂ©rer. Une fois quâon a triĂ© les urgences importantes, on laisse filer le reste des occasions, et on accepte que la vie nous en prĂ©sentera dâautres.
Le point de repĂšre, câest la question : « Quel est le risque si je ne le fais pas ? »
Le seul risque de ne pas prendre le cafĂ© avec cet ancien collĂšgue⊠câest peut-ĂȘtre seulement de laisser du temps passer.
LâintĂ©rĂȘt de cultiver ton rĂ©seau pro, ce nâest pas seulement de prospecter et de crĂ©er de lâengagement auprĂšs dâune communautĂ©.
Câest aussi se faire des ami.e.s-collĂšgues qui sont freelances, qui connaissent bien ton activitĂ©, et qui pourraient te filer un petit coup de main ponctuel.
Demande Ă X, ta bonne copine freelance, si elle accepterait de te filer un petit coup de main pour annuler quelques rendez-vous par mail, et pour poster ton article (dĂ©jĂ rĂ©digĂ©) sur Linkedin Ă ta place. Ăvidemment, le jour oĂč elle aura besoin dâun coup de main, tu lui rendras la pareille.
On ne demande que ce qui est possible et qui ne demande pas trop de temps, hein !
Dans le cadre dâune mission urgente pour un client, tu peux aussi simplement passer la mission Ă un.e collĂšgue-freelance en qui tu as confiance.
- Soit ton collĂšgue termine la mission avec le client.
- Soit il ou elle intervient en remplacement seulement pour quelques jours.
En retour, tu lui céderas le montant correspondant à son intervention, et tout cela est fait en accord avec le client.
Rien ne t'oblige Ă te faire remplacer. Tout le monde tombe malade, câest la vie. Les clients aussi tombent malades (et ils continuent de bosser avec toi).
Parfois, le plus simple reste de faire ce qui Ă©tait prĂ©vu, sans essayer dâen faire plus. Tu nâas pas postĂ© depuis deux semaines, car tu Ă©tais clouĂ©.e au lit ? Tu posteras ce qui Ă©tait prĂ©vu pour la suite, et basta !
La Terre continuera de tourner, et ton entreprise ne va pas sâeffondrer du jour au lendemain. Câest un bon exercice d'acceptation.
Si le fait de t'arrĂȘter une semaine gĂ©nĂšre un stress intense, il faut peut-ĂȘtre questionner sĂ©rieusement ce stress. Quels sont les enjeux que tu mets derriĂšre ton travail ? Pourquoi est-ce si grave, si important ? Quelles sont les consĂ©quences dâun arrĂȘt dâune semaine ?
Les réponses à ces questions sont-elles « saines », ou dénotent-elles une difficulté sous-jacente plus importante ?
Non, on ne va pas penser ça si tu es malade. On va penser que tu es humain.e.
Personne nâaime les annulations et les retards, et câest plutĂŽt normal. Tant que tu fais ton possible pour prĂ©venir tout le monde au plus tĂŽt, ce nâest pas grave.
Et si on te reproche sĂ©rieusement dâĂȘtre malade ? Si on te soupçonne de mentir sur ta santĂ© pour Ă©viter une Ă©chĂ©ance ? Le problĂšme se loge dans ce cas dans la relation avec ton client, ou dans sa culture toxique du travail. Câest un drapeau rouge. đ©
La bonne nouvelle câest que câest lâoccasion de faire le tri, et dâarrĂȘter de travailler avec ce genre dâinterlocuteur.
Tomber malade, câest normal. Ca fait partie du quotidien, et câest parfois lâopportunitĂ© de prendre du recul et dâĂ©valuer notre propre organisation. Peut-ĂȘtre mĂ©rite-t-elle un peu plus de flexibilitĂ©.
âĄïž Est-ce que je prends suffisamment de marge de temps sur mes projets ?
âĄïž Anticipe-je suffisamment des "temps morts", qui me permettent de gĂ©rer les imprĂ©vus du quotidien ?
âĄïž Suis-je constamment overbookĂ©.e ? Est-ce ce que je souhaite ?
Une semaine perdue de C.A. met-elle en danger mon Ă©quilibre Ă©conomique ?
Si la rĂ©ponse est oui, tu n'as pas assez de trĂ©sorerie et c'est bon Ă savoir. Pour traverser ton aventure entrepreneuriale avec sĂ©rĂ©nitĂ©, il est nĂ©cessaire de pouvoir encaisser des "coups durs" (et une semaine, ce n'est pas censĂ© ĂȘtre un gros coup dur).
Le point de repĂšre, c'est d'avoir toujours au moins 4-5 mois d'avance sur ta trĂ©sorerie. C'est-Ă -dire ĂȘtre capable de vivre confortablement pendant cette durĂ©e sans rentrer un seul euros dans la caisse.
Et toi, comment tu gĂšres tes moments "off" ?